((milkyway))

vénus parcoure l’univers depuis si longtemps qu’elle a parfois l’impression de s’y être perdu. de tourner constamment en rond, sans jamais dévier de son axe. bonjour, soleil. comment allez-vous, mars? hey, jupiter, ça fait longtemps! que de formalités pour tes comparses, formalités que tu n’as jamais laissé tomber, même après tant d’années. et pourtant, tu les envies. tu envies la terre d’avoir sa lune. tu jalouses saturne d’avoir autant de lunes et de satellites pour lui tenir compagnie. toi? toi, tu n’as jamais eu personne. tu jalouses tes comparses du système solaire d'avoir la chance d'être accompagnée, puisque tu es condamné à orbiter en solitaire, t'approchant sans jamais pouvoir toucher.

vénus, elle s’est souvent amourachée. elle a souvent eu le cœur brisé, l’âme esseulée. elle aurait voulu tendre la main, caresser la joue de proxima, quand elle la suppliait de lui donner de l’attention. elle aurait voulu serrer sirrah contre son cœur, lui dire à quel point elle enviait sa lumière, à quelle point elle voudrait se rapprocher. elle aurait voulu poser un baume sur les âmes esseulées de ses comparses. mais vénus, elle n’était que de passage. elle traverse la voie lactée, un doux sourire aux lèvres, éclatante, comme toujours, pour dissimuler ce mal-être qui la ronge.

et si tu avais pu être une étoile? vraiment.
peut-être aurais-tu été moins seule.

encore une fois, c’est la jalousie qui régit ton existence. ces astres qui brillent de mille feux, qui illuminent la voûte céleste. ces constellations qui parsèment ton paysage, qui rendent le voyage un peu moins ennuyant. t’as beau faire partie du système solaire, t’aurais tout donné pour t’en détacher et aller les rejoindre. rejoindre les étoiles les plus brillantes, rejoindre lucida, proxima, sirrah. tu aurais tout donné pour qu’elles orbitent près de toi jusqu’à la fin des temps. pour qu’elles soient tiennes.

cesse de prendre tes rêves pour réalité, vénus.
jamais ça n’arrivera.

on ne t’a jamais appris à ne jamais dire jamais.

au fil du temps, les hommes finirent par te prendre pour l’une d’entre elles. étoile du berger, tu les guides, leur sers de repère au sein de ces nuits noires. tu brilles plus ardemment que tout, avant le coucher du soleil, et même après son levé. tu veux qu’on te remarque. tu veux qu’on remarque ta lumière, qu’on t’accorde enfin de l’attention. qu’on te trouve important. pour une fois dans ta vie, quelqu’un se tournait vers toi. tu ne pouvais évidemment pas les remercier, mais tout au fond de toi, tu te savais reconnaissant.

reconnaissant jusqu’à ce que tout le monde se casse.

tu les as vu tomber. tu étais là dès le départ, fidèle au poste. tu ne pensais jamais que ça pourrait arriver. que les astres se décroche du ciel, qu’elles quittent le manteau du ciel pour descendre sur terre. y’a d’abord eu la terre, puis lune et soleil. lucida, aussi. plus les jours passaient, plus ton monde se vidait. la solitude, elle s’installe, elle te ronge les tripes. et tu finis par te dire que, toi aussi, tu pourrais te d é c r o c h e r. tu laisses tes amis, tes amours derrière toi et tu quittes ce ciel noir qui, depuis toujours, fut ton royaume. la chute est brutale, presque mortelle. tu as si peu de force, si peu d’envie. tu ne sais tellement pas où donner de la tête, ni même comment faire. c’est dans la cour arrière de ta nouvelle famille que tu ouvres les yeux, mal en point.

mais jamais aussi mal qu’eux purent le faire.

ce fut de la pure torture. toi qui croyais que les humains étaient gentils, qu’ils vous vénéraient presque. de l’autre côté de la voute céleste, tu as bien compris pourquoi ils revenaient toujours vers vous. pourquoi leurs yeux étaient toujours rivés vers le ciel, à vous contempler. la vue, elle était à couper le souffle. tu avais eu la chance de les côtoyer, ces étoiles. de loin, certes. mais d’ici, sirrah était encore plus majestueuse. sa beauté s’encrait dans ta peau, te rappelait à quel point tu aurais voulu tendre la main et l’attraper. sans jamais y parvenir.

on voulu te vendre. on voulu t’écarter, t’empêcher de vivre une vie normale. dès que tu en eus la possibilité, tu te sauvas. tu te construis ta propre vie, ta propre gloire. tu avais besoin que les gens te regardent, qu’ils te suivent. étoile du berger jusqu’à la fin, peu importe où tu les mènerais.